Abbeville

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Abbeville. Cette ville, située sur la Somme, à cinq lieues de la mer, n’était dans l’origine qu’une maison de plaisance du riche et puissant abbé de Saint-Riquier (Abbatis villa.) Peu à peu la villa abbatiale se transforma en un château entouré de maisons. À la fin du dixième siècle, Hugues Capet, trouvant cette position convenable, la fortifia pour arrêter les ravages des Normands, dont les barques remontaient alors tous les fleuves de la France qui se jetaient dans l’Océan ; et il y établit un de ses vassaux, qui porta le titre d’avoué, parce qu’il devait protéger les terres du monastère. Plus tard l’avoué s’adjugea le titre héréditaire de comte de Ponthieu, et Abbeville devint la capitale de ce comté.

Au moyen âge, Abbeville fut une cité industrieuse et commerçante ; elle fabriquait de gros draps qui trouvaient un grand débit aux foires de Champagne, où ses marchands conduisaient de nombreux troupeaux de porcs et de moutons. Colbert fit beaucoup pour l’industrie de cette ville en y appelant le Hollandais Van-Robais, qui y établit des fabriques de draps fins, façon de Hollande et d’Angleterre. Ce fut alors le temps de la plus grande prospérité d’Abbeville, et le géographe Sanson, qui vivait à cette époque et qui y était né, porte le nombre de ses habitants à trente-cinq ou quarante mille. Elle n’en compte aujourd’hui que 19,162 ; cependant, elle occupe encore un rang important parmi nos villes industrielles, par ses manufactures de draps, de velours et de moquettes.

Abbeville se vante de n’avoir jamais été prise, et elle se faisait appeler autrefois Abbeville la Pucelle. Tant que les Anglais restèrent, maîtres de Calais, la possession de cette ville fut très importante, parce que, gardant la ligne de la Somme, elle couvrait une partie de la Picardie et de la Normandie. Aussi les rois de France récompensèrent-ils la fidélité de ses habitants (semper fidelis était sa devise) par la concession d’importants privilèges, dont plusieurs étaient encore conservés au dernier siècle par ses majeurs. C’étaient comme les restes de l’ancienne constitution communale que les bourgeois d’Abbeville avaient obtenue en 1130, et qui fut confirmée le 9 juin 1184 par le comte de Ponthieu. Le préambule de cette charte de confirmation expose la cause de l’insurrection populaire. « Lorsque mon aïeul Guillaume Talvas, disait le comte, eut vendu la commune aux bourgeois d’Abbeville, à cause des injustices et des vexations que les grands de sa terre leur faisaient subir fréquemment, etc. » Abbeville eut donc alors, comme les autres communes, son maire, ses échevins, ses arbalétriers, sa milice du guet, ses corporations d’arts et métiers, son beffroi, le droit de battre monnaie, une juridiction étendue, etc. Plus tard la charge de majeur anoblit celui qui en était revêtu. En 1789, le gouvernement aussi bien que la justice, la police et la milice de la ville et des habitants, appartenaient encore à ce magistrat.

Abbeville est aujourd’hui l’un des chefs-lieux d’arrondissement du département de la Somme. L’hôtel de ville et l’église de Saint-Vulfran sont des monuments remarquables.

C’est dans cette ville que fut ratifié, en 1258, le traité par lequel Louis IX rendit à Henri III le Limousin, le Périgord, l’Agenois, le Quercy et une partie de la Saintonge, à charge par le monarque anglais de lui rendre hommage pour ces provinces et pour Bayonne, Bordeaux et la Guienne.

Abbeville est la patrie des géographes N. Sanson, Phil. Briet et Pierre Duval, des graveurs Cl. Mellan et Fr. de Poilly, du poète Millevoye.

[biblio]

Histoire d’Abbeville, par M. Louandre, 2 vol. in-8o.

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